Sortie de ce classique: 2002
Durée de ce classique:
LA PLANETE AU TRESOR - UN NOUVEL UNIVERS n’est pas une simple transposition
futuriste du célèbre roman de Robert Louis Stevenson: le film possède
sa propre intégrité, développant cette histoire intemporelle à travers
une vision humaine et unique de la science-fiction que seul Disney
pouvait apporter.
"Nous souhaitions créer un nouveau monde qui n’appartienne ni au passé
ni au futur, explique Ron Clements. J’ai toujours apprécié la science-fiction
et depuis que j’ai commencé à travailler chez Disney, j’ai eu envie
de traduire ce genre dans un film du Studio. Mais je ne voulais pas
de quelque chose de high-tech ni de trop futuriste qui pourrait devenir
daté. L’ILE AU TRESOR m’a semblé idéal parce que l’intrigue est intemporelle.
Nous avons voulu faire notre film comme si Robert Louis Stevenson
avait écrit un roman fantastique et de science-fiction. C’est comme
si le futur était vu depuis le dix-huitième siècle. Il n’y a ni ordinateurs,
ni télévisions, mais plutôt des éléments du siècle passé qui auraient
pu être transplantés dans le futur. L’alliance des symboles de la
piraterie et de l’univers donne un résultat surprenant de cohérence.
Nous avons abouti à notre propre combinaison d’éléments en nous inspirant
fortement du passé afin de lui donner une chaleur dont le genre est
habituellement dépourvu".
Mais revenons en 1985. A cette époque, juste après le coup d’état
salvateur de Roy Edward Disney et Michael Eisner, Walt Disney Feature
Animation cherche de nouvelles idées. La première suggestion de Ron
Clements est alors "La Petite Sirène",
mais le projet est d’abord rejeté à cause de sa proximité avec "Splash",
produit en 1984 - refus de courte durée comme on sait… La deuxième
idée de Ron Clements, "L'île au Trésor dans l’espace"
est, elle, accueillie tout de suite avec enthousiasme, mais finalement
suspendue au profit d’autres projet du fait que la technologie capable
de concrétiser cette vision n’était pas encore au point. Après "La
Petite Sirène", Ron Clements et John Musker reviennent
à leur projet de planète au trésor en commençant à exécuter quelques
dessins préliminaires et à développer une histoire. Mais, lorsque
se profila l’occasion d’écrire et de réaliser "Aladdin",
le projet fut à nouveau repoussé. Mais il ne sera pas dit que "La
Planète au Trésor" sera restée lettre morte: ce
sera un projet futur. La flamme ne s’était pas éteinte et les progrès
des techniques d’animation rendent enfin le projet réalisable dans
toute sa richesse. Ron & John écrivent alors un nouveau scénario et
commencent à travailler avec Rob Edwards. Le directeur artistique
Andy Gaskill a contribué à visualiser le monde de "La Planète
au Trésor" en suggérant une approche "70/30": 70% de l’inspiration
pour les décors et les accessoires viendraient du passé et 30% du
futur, apportant ainsi la chaleur qui fait la particularité de l’esthétique
du film. Cette fameuse "loi du 70/30" ne se rapporte d’ailleurs pas
seulement à l’univers de Jim Hawkins mais régit toute la philosophie
du film, dans une approche finalement plus disneyenne que jamais.
"La Planète au Trésor" se présente quant à
elle comme une oeuvre de maturité du couple infernal de Disney. Ce
n’est plus le design pour le moins énergique de Scarfe auquel ont
fait appel les créateurs du film, mais plutôt au style magnifique
de l’école de Brandywine (du nom d’une rivière de Pennsylvanie près
de laquelle ce groupe de peintres aimait à se retrouver pour trouver
l’inspiration). Afin de retrouver ce style et cette lumière dans "La
Planète au Trésor", Andy Gaskill et le superviseur
artistique des décors Dan Cooper ont cherché à donner à l’image une
texture proche de la peinture à l’huile. Comme l’explique Andy Gaskill
dans TREASURE PLANET - A Voyage Of Discovery, "Normalement, on
encourage les peintres des décors d’animation à ne pas laisser de
traces. Cela inclut les coups de pinceaux ou toute autres trace de
l’acte-même de peindre, de telle sorte que le spectateur se concentre
davantage sur l’image que sur sa texture. Cependant, les peintres
de Brandywine sont bien connus pour leur science de l’utilisation
du pinceau, et nous sommes tous tombés d’accord pour faire l’effort
d’imiter cette technique. Tout au long de la production, les peintres
ont expérimenté différents degrés de texture. Il y avait des moments
où la texture prenait nettement trop d’importance dans l’image et
nous leur avons demandé de l’atténuer, mais nous avons toujours recherché
des opportunités de faire apparaître la texture de façon naturelle:
un mur, une poutre, une marmite". Cette approche "peinture à l’huile"»
n’avait pas été retentée depuis 60 ans, avec "Bambi".
Mais tout l’art des décors de ce film réside dans le fait que cette
renaissance a été rendue possible par le dernier cri de la technique,
comme l’explique Dan Cooper: "C’est le premier film que nous ayons
entièrement mis en couleur par ordinateur. On procède toujours en
peignant touche par touche, mais au lieu d’utiliser un pinceau, on
emploie un stylet. Obtenir ce style visuel "peinture à l’huile" à
la main aurait été impossible parce qu’il faut compter six mois à
un an de séchage par peinture… Avec l’ordinateur, on obtient exactement
le même aspect instantanément".
Et c’est bien là le secret de la réussite de ce film: tout en permettant
à la technique de progresser, il ne s’agit en rien d’une démonstration
creuse (comme pouvait l’être malheureusement A.I.). "Le roman possédait
l’essence d’une fabuleuse aventure, ajoute le président de WDFA. En
unissant les qualités propres de l’oeuvre et notre savoir-faire, nous
avions le potentiel d’un grand film émouvant et drôle, passionnant
et spectaculaire. Ce film occupe une place à part. Le jeu des personnages
est développé comme jamais auparavant. Les concepteurs et les animateurs
se sont attachés à créer un véritable jeu d’acteur pour chacun des
personnages". Car l’une des approches spécifiques du film renoue
avec un thème dans lequel Disney a excellé dans les années 90: l’adolescence.
Tout a commencé avec Ariel, une adolescente comme beaucoup de personnages
à venir, et c'est précisément l'adolescence qui va permettre à Disney
de développer les idées de Walt dans un contexte maintenant nouveau
et inédit, un contexte rajeuni et enrichi. Depuis la fin des années
60, on ne passe plus de l'enfance à l'âge adulte d'un seul coup, en
changeant de chambre comme chez Wendy Darling. L'adolescence, l'âge
des remises en cause et des questionnements, l'âge de l'ironie, du
délire, mais aussi des réflexions et des sentiments d'adultes (le
romantisme), constitue une nouvelle phase importante de la vie et
réunit un nouveau groupe social, et donc un nouveau marché. C'est
pour Disney une autre manière de s’exprimer, en créant des personnages
à la fois hauts en couleurs et profonds, des personnages complexes
constituant un potentiel énorme pour qui sait l'exploiter et dont
la force de caractère donne plus d’acuité encore aux problèmes qu’ils
soulèvent, des personnages auxquels un nouveau public va pouvoir s’identifier.
Non pas que ces personnages soient tous des adolescents-types, mais
ce thème laisse apparaître une question récurrente: la question de
l'identité. Le public se sent irrépressiblement intéressé par un personnage
qui se cherche, à l'image de chacun de nous, et qui cherche sa place
dans la société, dans le monde, en fonction du thème précis abordé
dans chaque long-métrage d'animation (Ariel: la tolérance, Belle:
la contingence, Aladdin: les apparences, Pocahontas: les différences
raciales, Quasimodo: la différence physique, Hercule: le concept de
héros, Mulan: les conventions sociales). Si Tarzan se pose toujours
des questions d’identité, il inaugure un déplacement vers d’autres
problématiques achevé avec "Dinosaure"
puis "Atlantide". L’arrivée
de Jim Hawkins sonne donc le retour du héros-adolescent, traitant
de problèmes certes moins universaux que ceux qu’incarnent Aladar
ou Milo, mais beaucoup plus proches de tout un chacun, comme le souligne
le compositeur des chansons du film, John Rzeznik: "Jim est devenu
quelqu’un de réel pour moi. Il se lance dans une quête à la recherche
de ce qu’il est, et bien qu’il s’en sorte avec quelques cicatrices,
il devient un homme. Je me suis senti facilement proche de lui parce
que je lui ressemblais beaucoup au même âge", et plus contemporains.
Comme l’explique Ron Clements dans TREASURE PLANET - A Voyage Of Discovery,
"En commençant ce film, nous nous sommes aperçus qu’il existait
un grand nombre d’écrits concernant les problèmes que rencontraient
les adolescents dans nos sociétés modernes, et particulièrement les
garçons ayant un père absent ou négligent. Plusieurs ouvrages récents
considèrent que les garçons d’aujourd’hui n’ont aucune relation affective
ce qui les place en plus grand danger que par le passé. Nous avons
essayé d’incorporer ces idées dans notre développement de Jim. Nous
voulions le présenter comme un adolescent moderne confronté aux nombreux
problèmes que les jeunes rencontrent dans la vie. Je pense que ce
changement nous a permis de faire en sorte que Jim grandisse davantage
au cours de l’histoire et de nous focaliser encore plus sur sa relation
avec Silver".
Bien
qu’il ait été justement en charge du personnage de Silver, Glen Keane
a aussi l’habitude de participer à l’élaboration de l’histoire des
films sur lesquels il travaille et d’en storyboarder certaines séquences.
Ce fut le cas ici pour l’une des séquences-clefs du film: celle de
la chanson Un Homme Libre (I’m Still Here), magnifiquement interprétée
par David Hallyday, et qui donne tout son sens au film. Car le dessin
n’est pas la seule passion de l’animateur de Tarzan… Glen Keane est
actuellement l’un des plus grands animateurs de Disney - si ce n’est
le plus grand. Il suffit pour s’en convaincre d’évoquer les personnages
qu’il a animés: Ratigan, Ariel, La Bête, Aladdin, Pocahontas, Tarzan
et John Silver. Pour Thomas Schumacher, président de Walt Disney Feature
Animation, "Glen Keane est un grand animateur qui apporte énormément
de profondeur et d’émotion à ses personnages. Personne d’autre n’a
eu autant d’influence sur les films du Studio". Originaire de l’Arizona,
Glen Keane étudie l’animation à Cal Arts, après avoir hésité entre
le dessin et… une carrière de foot-baller. C’est en septembre 1974
qu’il entre chez Disney où il reçoit les conseils de maîtres comme
Eric Larson ou Frank Thomas et Ollie Johnston. Acteur fervent du renouveau
de Disney, il continue aujourd’hui encore son œuvre de pionnier en
faisant de John Silver le premier personnage de dessin-animé associant
le crayon et la palette graphique. Artiste complet et visionnaire,
la musique a une énorme influence sur son travail, que ce soit dans
le choix d’un personnage, son animation ou le storyboarding ainsi
que dans sa vie personnelle. Nous avons eu le grand plaisir de parler
avec lui de ces questions… en français, s’il vous plaît !
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