Kuzco sort sur les écrans le 28 mars 2001. Durée de ce classique: .. minutes
Ce nouveau Disney nous fera mourir de rire. Ce film a necessité des mois de travail acharné. Kuzco semble s'inscrire dans la tradition des grands contes fées car le personnage principal subit une métamorphose qui va remettre son existence en cause. Les auteurs ont fait en sorte que les personnages soient attachants et que le comique vienne de leurs personnalités, ils souhaitaient aussi véhiculer un message positif sur l'amitié.
EXPLICATION:
Nick Ranieri, l'animateur du personnage Kuzco, a affirmé qu'animer Kuzco le lama représentait un véritable défi, cet animal a un très long cou; il est donc très difficile de lui donner des attitudes et des mouvements réalistes, comme le faire hausser les épaules. Il a même été amené à faire venir des lamas au studio!
Kuzco a été le premier événement du festival du dessin animé
de Bruxelles puisqu'il en fut le film d'ouverture mais aussi parce
que deux de ses créateurs étaient présents pour une conférence simple
et passionnante, racontant le long voyage (qui a débuté en 1994!)
de Kuzco de la tragédie à la comédie. Car au début, la volonté de
Disney était de faire une épopée sérieuse sur le monde des Incas.
Randy Fullmer, le producteur, raconte que lui et le scénariste du
"Roi Lion", Roger Lyers, accompagnés de 20 artistes, sont partis au
Pérou pour s'inspirer du graphisme sud-américain, visitant musées
et autres splendeurs pendant plus de 10 jours ("éreintants" selon
Fullmer). Au même moment, le chanteur Sting avait été contacté et
planchait déjà sur des chansons pendant que se tissait une histoire
très classique autour de la tradition inca. Les scénaristes avaient
imaginé une "méchante" obsédée par la beauté dont le soleil était
l'ennemi juré, qui pactiserait avec le diable pour faire tomber un
voile d'ombre sur la terre pour cacher le soleil. Ils se sont vite
aperçus que c'était une mauvaise idée car cela manquait cruellement
d'amour et que l'intrigue était trop compliquée. Aussi, le but poursuivi
par la "méchante" était autre que celui du héros, un dieu ou une déesse,
ce qui complexifie la trame dramatique et la décrédibilise. Le problème,
c'est que Sting avait déjà ses six chansons malgré l'histoire insensée
qui avait été écrite. En plus, à cette époque, Disney avait reçu des
critiques quant à sa conception des films, toujours semblable, construite
autour de six chansons dont une d'amour. Malgré la non-satisfaction
des créateurs, on monta un bout de film, à partir du story-board et
des chansons auxquels on ajouta des dialogues. Les séances test furent
catastrophiques et les "gens", honnêtes, de Disney jugèrent le film
mauvais. Pour eux, l'histoire était trop compliquée et comprenait
trop de personnages. Et même si le film fut modifié à trois reprises,
il restait médiocre et peinait à trouver sa voie depuis plus de deux
ans. Il fut alors expliqué à Sting que Disney n'avait plus besoin
de ses 6 chansons; Sting, très philosophe et déçu aussi, comprit et
dit "qu'il valait mieux arrêter si on faisait fausse route". R. Fullmer
avait néanmoins peur pour sa réputation car c'était son premier job
de producteur et il devait, après deux ans de travail inutile, persuader
Disney de continuer en remaniant l'histoire. Il se demande encore
aujourd'hui comment on accepta de continuer. Ils se mirent alors en
question et regardèrent les classiques "Peter Pan" et "Pinocchio",
se demandant ce qui faisait leur magie et leur charme. La réponse
fut simple: "l'impression de connaître les personnages depuis longtemps
tellement ils sont attachants. Ils possèdent une telle fraîcheur qu'ils
nous apparaissent comme des amis". Ils virent l'humour sous un autre
angle, considérant que dans la première version du film seul l'aspect
comique fonctionnait bien, ils choisirent donc la comédie comme mode
narratif. Sting marqua son accord pour réécrire des autres chansons
dont la chanson d'ouverture qui fut composée en trois heures après
qu'il eut visionné la première partie du film car on la voulait dynamique
et rythmée. Fullmer raconte à ce sujet une anecdote très drôle: "Sting,
alors âgé de 50 ans, avait refusé de chanter se considérant trop vieux
et finalement c'est le sexagénaire Tom Jones qui a prêté sa voix au
morceau" ironise-t-il. Il restait maintenant deux ans pour peaufiner
le dessin animé, "un délai limité mais suffisant grâce à la passion
de tous". Le producteur américain avoue que cette pression a nourri
le film et juge miraculeux le fait qu'il soit resté producteur: "Je
remercie Disney car il permet d'explorer plusieurs pistes et est ouvert
à la créativité. Ils m'ont donné le droit à l'erreur et ça c'est fantastique".
Pour l'animateur, Nick Ranieri, ce fut un vrai défi. Chargé de dessiner
le personnage de Kuzco, il a pu s'exprimer différemment qu'à l'accoutumée.
Il faut dire que l'empereur est passé par plusieurs physionomies dont
les plus saugrenues: les premières ébauches présentaient un inca trop
contemporain, aux traits exagérés, inadaptés au graphisme; Nick redessina
de façon plus traditionnelle mais là l'animation, fade et sans reliefs,
ennuyait. Il le pimenta alors de détails savoureux comme la mèche
de Cameron Diaz dans "Mary à tout prix" mais le résultat était toujours
plat. Recommença une phase de tests où Kuzco fut tour à tour séduisant
puis plus méchant donc laid "à gifler", pour enfin être ni beau ni
laid. Pour le lama, "ce fut plus facile: il s'agit d'un corps d'animal
qui possède des caractéristiques humaines (celles de Kuzco)" précise
l'animateur américain qui s'est même inspiré de sa petite fille, Belinda,
pour Kuzco "bébé". Ce dernier nous a aussi confié que la scène de
danse qui constitue l'ouverture fut la scène la plus excitante à animer,
une scène qui a pris plus d'un mois car les personnages étaient trop
raides au départ. Il leur a fallu attacher une importance primordiale
à foule de petits détails tels les boucles d'oreilles, les vêtements
mais aussi les mouvements qu'ils voulaient légers et aériens. Il a
aussi insisté sur le travail effectué sur les effets d'ombre et les
couleurs pour lesquelles l'ordinateur fut uniquement utilisé. Malgré
ces échecs répétés, Disney est fier du résultat, un dessin animé réjouissant,
dans la veine de Tex Avery et de Chuck Jones, une comparaison qui
fait plaisir à Fullmer, fort de son premier job, réussi, de producteur.
Au final, "Kuzco", sans atteindre la puissance des classiques "Disney",
est un film drôle et adulte. D'ailleurs les parents y prendront plus
de plaisir que leurs enfants. Avec ses multiples références et irrévérences
(sans être corrosif) au cinéma classique ("Austin Powers") ou au dessin
animé ("Merlin L'Enchanteur"), il consacre l'humour, parfois un peu
noir, le "nonsense" et l'absurde des situations légères, subtilement
imaginées. Ici, ce n'est pas l'amour qui passe au premier plan, mais
le quiproquo, le malentendu, l'intrigue et l'aventure. Le rire est
communicatif, les grimaces sont délicieuses, les caractères, (stéréo)typés,
font mouche. Soutenu par la musique enlevée de Sting, Kuzco danse,
râle, tombe dans les ravins avec autant d'indifférence que de prétention
et c'est ce qui fait de lui un (contre) héros succulent et hors norme,
insolent et rare. Enfin, Izma, une "grande" méchante comme seul Disney
peut les penser, ça ne peut pas se manquer...
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